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CA 235

Courant alternatif décembre 2013 est sorti

éditorial et sommaire

jeudi 5 décembre 2013, par admi2


Les luttes de boîtes sont trop importantes pour les laisser aux syndicats.

27 personnes se suicident chaque jour en France… Et 700 tentent de le faire.
Par ailleurs, une étude du Conseil Economique et Social indique que près de 400 suicides par an seraient liés au travail ; sans compter tous ceux qui ne sont pas reconnus comme tels (par les patrons étonnamment). Des boîtes comme Renault, Orange, PSA, Thales, H&M, EDF ou SNCF font régulièrement l’actualité pour cette tragique raison. Bien sûr, pour les suicides en entreprise comme pour les fermetures et autres plans sociaux les médias ne parlent que des grosses sociétés, mais tous les secteurs d’activité, toutes les boîtes quelles que soient leurs tailles sont touchées.
Le terme « acte désespéré » est souvent cité lorsqu’un cas de suicide à cause du travail est relaté mais d’autres actes sont décrits comme tels, en particulier les grèves de la faim et les menaces de faire exploser la thurne. Pour ce qui est des suicides et des grèves de la faim, outre la solidarité, l’empathie, la douleur et la colère que nous ressentons, nous ne pouvons qu’être interpellé(e)s par le fait que les salarié(e)s en souffrance tournent la violence contre elles & eux-mêmes.
Bien évidemment, la première violence dans nos sociétés est celle de la classe dirigeante qui va des patrons et gouvernants qui leur sont inféodés, aux exécutants des basses œuvres, petits chefaillons, ressources humaines (rien que ce terme est une insulte) et flicards de tous poils. Ainsi si l’on se dit qu’il est normal que la réponse aux agressions de la classe qui nous exploite soit au moins à la hauteur de de la violence qu’elle nous fait subir, nous ne pouvons qu’être consterné(e)s que les mouvements collectifs qui ont fait la joie et les riches heures des combats ouvriers des 19ème & 20ème siècle ont trop souvent laissé la place à l’isolement des salarié(e)s en bute à des conditions de travail délétères, anxiogènes voir mortifères.
Évidemment il n’est pas question de fantasmer sur les luttes ouvrières passées ni d’oublier les très nombreux combats menés actuellement dans moult boîtes, mais de s’interroger sur le pourquoi de cette augmentation exponentielle des suicides dus au travail.
Les psychologues de comptoir arguent de l’individualisation de la société, du repli sur soi au détriment du collectif. Ces analyses portées par ceux-là même qui affirmaient que la lutte des classes était un concept dépassé nous intéressent peu si elles ne vont pas plus loin pour déterminer la cause racine de cette individualisation. S’il y a isolement des salarié(e)s, il est principalement dû aux politiques sociales destructrices mises en place par le patronat dans son ensemble : Objectifs individuels, course aux rendements & à la productivité pour les plus petit(e)s, à la performance pour les autres, mise en compétition des individus, des équipes et des sites menant aux externalisations, délocalisations et fermetures… L’adage populaire « diviser pour mieux régner » n’a jamais été autant d’actualité. Un patron reste un patron. Du petit qui te tape dans l’dos (mais qui n’hésitera pas à mettre la clé sous la porte si besoin après avoir assuré ses arrières) au dirigeant de multinationale, la constante reste la volonté d’engraissement maxi sur le dos des travailleurs & travailleuses par tous les moyens possibles. Rien de nouveau à ce que ces personnages marchent sur la tête de celles & ceux qui font leur richesse. Par contre ce qui augmente le sentiment d’impuissance face aux exploiteurs, c’est la collaboration de classe. Ce n’est pas une nouveauté mais là, les syndicats représentatifs l’ont élevée au rang de discipline olympique.

Pour ne prendre qu’un exemple de grosse régression sociale, qu’en aurait-il été de l’ANI si des syndicats traîtres ne l’avaient pas signé ?
Les directions de Peugeot & Renault ne s’y sont pas trompées en imposant dans la foulée leurs accords de compétitivité laminant toujours plus les conditions sociales de « leurs » employé(e)s, ouvrant ainsi la voie aux autres entreprises. Accords qu’une majorité de syndicats se sont empressés de signer. Évidemment, les suicides ne sont pas à mettre sur le compte du renoncement des syndicats mais à force de vouloir passer pour des partenaires responsables, les directions syndicales ainsi que de nombreuses sections passent plus de temps dans les salons feutrés à cogérer que sur le terrain. Le travail n’est plus réalisé à l’échelle micro - la défense au jour le jour des salarié(e)s, comme à l’échelle macro - le travail de coordination des luttes. Et quand il se fait ce n’est plus grâce à ceux qui en ont pourtant les prérogatives & les moyens.
De nombreux/ses camarades, syndiqué(e)s ou non se battent dans leurs boîtes mais sont trop isolé(e)s car l’action directe n’est pas la priorité des bureaucrates… C’est pour cela que ces derniers se sont retrouvés à Carhaix le 2 novembre alors que les salarié(e)s en lutte de Marine Harvest, Tilly-Sabco & Gad se faisaient vampiriser leur manif par des personnages aux objectifs plus que contestables. Le choix des directions syndicales de ne pas manifester à Quimper restera une triste illustration de leur mépris pour la base, de leur méconnaissance des combats qui se mènent sur le terrain et de leur angoisse à l’idée de se faire déborder par les travailleurs & travailleuses en lutte.

Loin de tout ça, Stéphanie qui avait 31 ans s’est suicidée le 4 novembre. Mal notée, elle était en mise à pied conservatoire en vue d’un licenciement. Quelques mois avant, sur ce même site de 10 000 personnes bien connu pour ses suicides à répétition, les bureaucrates de la CGT ont tenté de retirer à un de ses militants son mandat de délégué au CHSCT sous prétexte qu’il avait incité une personne en souffrance à déclarer un accident de travail contre l’avis de la direction. Encore avant, cette même CGT a suivi bien docilement les recommandations de la direction lui demandant de ne pas ébruiter le suicide début 2013 d’une autre jeune femme, maman de 2 enfants, également en disgrâce. Tant qu’il y aura des exploité(e)s, des personnes en souffrance, des patrons, des collabos & des traîtres nous aurons raison de nous battre ! Tant qu’il y aura des luttes, nous en serons ! Et quand il n’y aura plus de luttes… Il y en aura encore ! La lucha se justifica !

Région Parisienne, le 25/11/13


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